Historique de CollectifHamlet.JournalFragmentVI

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16 décembre 2008 à 09h30 par Aurélie -
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Pour la scène 6, où Hamlet attend, avec Horatio et Marcellus, de voir l’apparition du fantôme et qui se poursuit par ce tête-à-tête avec ce dernier et le protagoniste, l’idée première fut de trouver, à travers le quarto 1 et la version traduite par Google, une clé assez forte qui pourrait m’aider à aborder cette partie.

Le fantôme m’est assez vite apparu de façon claire. C’est un être errant, perdu entre deux mondes, qui s’est fait assassiner dans son sommeil par son propre frère. Ce roi déchu, tout aussi guerrier et impitoyable qu’il eût été avec ses plus féroces ennemis, est incapable à présent de se venger de son propre sang. C’est pourquoi j’ai voulu en faire un être fébrile, à part, irrationnel dans son discours même et de ce fait effrayant. Il peut avoir une forme très humaine mais parler avec un langage de l’au-delà qui ne fasse presque pas sens pour nous. Le langage Google me paru intéressant de ce fait. Je l’ai retravaillé afin de m’assurer que toutes les informations que donnent le fantôme sur les circonstances réelles de sa mort y soit compréhensibles pour Hamlet mais aussi pour le spectateur. C’est en effet un moment clé de la pièce ou le protagoniste se transforme en fils vengeur. Il fallait donc justifier cette transformation. Pour les réponses du fils, je ne me suis pas référée au texte Google, mais plutôt au premier quarto en anglais. J’ai voulu le même nombre de répliques et le même contenu. J’ai fait de même pour la première partie de la scène. J’ai repris le quarto 1 et, pour chaque réplique, j’y ai noté le thème. Dans la version traduite sur internet, j’ai simplement souligné des expressions que j’aimais, dans le but de les intégrer à mon texte. Enfin, je me suis confrontée à la réécriture sans plus aucun autre document que ce brouillon contenant le squelette de la scène.
C’est alors que m’est apparu une idée qui à été déclencheur : et si toute cette histoire de fantôme n’était qu’une machination de l’esprit d’Hamlet ? Et si personne d’autre qu’Hamlet ne voyait ce-dit fantôme ? Il aurait pu mal interpréter les dires d’Horatio et penser que ce-dernier avait vu son père alors que ce n’est pas vrai. Tout en sachant que, pour l’homogénéité du résultat final, il faudrait certainement oublier ce parti-pris, je m’en suis tout de même servi afin de faire d’Hamlet un personnage lyrique, aux prises avec ses angoisses, un peu fou et cynique.
J’ai voulu alors débuter la scène avec ces trois personnages dispersés dans l’espace scénique, tous repliés sur eux-mêmes, luttant contre le froid, en position d’attente. J’ai voulu qu’Hamlet parle de manière plus poétique que les autres (façon aussi de répondre à l’étrange poème du père dans la suite de la scène). Je l’ai donc fait marmonner des paroles installant l’ambiance, le froid, le vent, la neige. Le mot « piqué » qui revenait souvent dans la version Google m’a d’ailleurs mise sur cette piste d’un froid piquant, griffant la peau. En ce qui concerne le fantôme je lui ai fait prendre la forme d’une brutale bourrasque de vent, afin de ne pas le montrer en tant que telle et garder le mystère entier.
Pour Horatio, je me suis posé cette question : pourquoi reste-t-il si fidèle à Hamlet? Je me suis alors dit qu’il était sûrement un peu plus jeune qu’Hamlet et qu’il l’avait toujours vu comme un grand frère qui lui avait toujours été fidèle. Cette fois c’était enfin au tour d’Horatio de soutenir cet ami précieux dans son malheur. Et même si celui-ci semble être fou, peu importe, Horatio ne l’abandonnera pas. Toujours dans cette idée de machination Hamletienne folle, j’ai voulu faire des répliques de ce personnage des répliques très courtes, dont le sens pouvait être multiple, d’où le « On dit qu’ils rendent fous ». Qui ? Les fantômes ou les vents ? Je l’ai aussi fait moins fort qu’Hamlet dans le sens où il laisse à ce premier l’art de parler et que ses répliques à lui soit toutes dirigées vers ce frère, dans le but soit de l’appuyer ou de tenter de le soutenir. Il n’arrive cependant pas à retenir Hamlet qui, comme obnubilé par l’apparition quitte la scène.
Pour Marcellus, j’ai décidé de le garder même si son rôle dans cette scène ne m’apparaissait pas essentiel. J’ai décidé d’en faire une sorte de vieil homme à qui les émois de jeunes garçons fait bien rire. Il a déjà tout vu et connaît les contes et légendes, les histoires de fantôme, etc. Il laisse Hamlet faire ses propres expériences et son « quelque chose de pourri dans le royaume du Danemark » résonne alors comme une maxime, un oracle.

Le problème relevé cependant était que tout était « trop dit ». J’ai donc, en deuxième réécriture, repris cette scène et, avec l’aide de Vincent Gomez, j’ai épuré les répliques d’Hamlet. Je l’ai d’ailleurs fait asseoir et écrire dans un carnet pour justifier le fait qu’il se mettait à maugréer des paroles poétiques, seul, dans son coin. Je l’ai également fait raturer et soupirer. Hamlet, nous pouvons le voir dans ses poèmes à Ophélie ou dans sa manière de jouer, est un poète raté. Entre ce qu’il pense et ressent et ce qu’il dit et écrit, il y a une marge. J’ai placé la scène dans un cul-de-sac, endroit sale où les poubelles sont entreposées, afin de faire le lien avec la scène suivante de Catherine Arsenault et afin de donner un deuxième sens à la phrase « pourri dans le royaume du Danemark ». J’ai également fait d’Horatio une sorte d’acteur épuisé de rejouer sans cesse la même pièce et qui connaît ce qui va se passer, d’où l’introduction du walkie-talkie et de la fameuse phrase de régie « Stand by Ghost scene. Ghost scene go ! » Pour ce qui est d’Horatio, j’ai enlevé quelques-unes de ses répliques pour ne pas alourdir le rythme. J’ai également fait partir Hamlet dans une bourrasque de vent, de sorte qu’Horatio ne puisse pas le rattraper et ne fasse que crier dans le vide. Cela sépare d’autant plus les deux mondes dans lesquels vivent ces deux personnages et l’impuissance d’Horatio à protéger son grand ami de la chute. J’ai également coupé dans la partie où Hamlet exprime sa colère contre le mariage de son oncle avec sa mère en renforçant plus encore le thème de l’orgie et de la consommation.

Pour la troisième réécriture, il fallait que je justifie l’introduction du walkie-talkie. J’ai donc, ajouté du brouillard dans le moment de l’apparition du fantôme ainsi qu’une ombre s’approchant, qui peut aussi bien être celle d’Horatio ou celle d’une d’Hamlet-père. Puis une voix crachotante (celle du walkie-talkie ou d’Hamlet père) maugréer de façon à peine audible le « Stand by Ghost scene. Ghost scene go! ». Cette voix se retrouvera en stéréo dans l’interaction entre le fantôme et Hamlet. C’est elle qui dira le texte du fantôme, laissant le doute concernant le fantôme. De plus Laurence Perrault-Rousseau et Catherine Arsenault ont également intégré cette idée de voix crachotante dans leurs textes.
Pour ce qui est du poème du début, la consigne était d’intégrer la lettre écrite à Ophélie. Reprenant mes mots et le thème du vent et du froid, j’ai été cherché les mots des poèmes grivois dits par la Ophélie-folle de la scène 19. Cette fois-ci, ces mots sont uniquement romantiques et lyriques, voire même caricaturalement mièvres. J’ai également épuré mes didascalies trop nombreuses dans la perspective de la lecture publique et, sous les conseils de Stéphane Zarov, j’ai intégré plus d’anglais dans mes répliques afin de faire le lien avec d’autres scènes.

À la lumière de la lecture publique, j’ai décidé d’intégrer le mal au yeux d’Hamlet que Jonathan Bécotte avait développé dans sa scène. Hamlet, même si c’est la nuit, porte jusqu’à l’apparition du fantôme de grosse lunettes de soleil noires. Pendant son interaction avec le fantôme, les lunettes ont disparu mais le protagoniste se frotte les yeux de temps à autres. Cela ajoute à son trouble. Nous ne savons pas encore pourquoi il se frotte les yeux, car l’explication arrive par la suite, mais cela ponctue le dialogue d’Hamlet et donne au comédien des actions concrètes sur lesquelles s’appuyer. Au départ, il peut exprimer son énervement en raturant dans son carnet, et dans cette scène il se frotte les yeux.

À vous de jouer !
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