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(2009)
Agnes et Valerie tuent un homme avec qui elles ont eu (ou souhaitaient avoir) des relations sexuelles puis le prennent en photo pour mettre sur leur blog. C’est ainsi que « That pretty pretty ; or the rape play » débute. Loin d’être une histoire linéaire aboutie, la pièce met aussi en scène deux hommes, Owen et Rodney (surnommé « The Rod » par son ami), respectivement scénariste et vétéran de la guerre. Leurs liens avec Agnes et Valerie sont d’abord flous (si ce n’est des tensions sexuelles entre elles et eux). Plus la pièce avance, plus les liens se multiplient sans toutefois s’éclaircir (avec l’apparition du personnage de Jane Fonda en tenue d’aérobie). Les scènes se succèdent, les rôles s’inversent, les deux hommes tuent Agnes après l’avoir violé, et l’histoire bascule. Entre les récits troublants de flash-backs de la guerre, de clinique d’avortement qui explose, de mari infidèle et de récital de piano, That pretty, pretty ; or the Rape play est une pièce circulaire, qui questionne et déconstruit sans cesse les rapports sociaux de sexe et les mécanismes de domination et de pouvoir.
D’un point de vue strictement formel, la pièce n’a pas une forme classique, ne présente pas d’actes ni de scènes à proprement parlé. Par contre, elle contient une quantité impressionnante de didascalies et d’indications scéniques, souvent pour décrire les chorégraphies et les combats. Quant aux indications de jeu, elles sont présentes et très personnelles à l’auteur.
Ce qu’il ne faut pas perdre de vue dans « The Rape Play », c’est que tout est toujours gorgé de sens, même si de prime abord, les mots et les expressions fusent sans avoir de liens entre eux. Pièce fracturée, fragmentée, dure, Callaghan ne ménage pas son public en mettant en scène des viols – comme l’indique le nom de la pièce – et des femmes ou soumises et violentées, ou incontrôlables et violentes. Questionnant l’image de la femme dans les médias, la marchandisation à la fois du corps féminin et de l’image attendue de la femme dans la société contemporaine, les thèmes et les références se chevauchent et se rejoignent dans un ballet cyclique. La grande particularité de la pièce provient de l’inversion constante des rôles masculins et féminins : les mêmes scènes et les mêmes dialogues sont repris par les hommes, leur procurant une toute autre signification et une tout autre teneur. Si on peut se sentir largué par le rythme effréné de la pièce et le peu de cohésion entre les « propositions scéniques », Owen donnera la clé de compréhension vers la fin de la pièce, suggérant alors que tout ce à quoi nous avons assisté depuis le début n’est au fond qu’un produit de son imagination, que la mise en scène de son scénario.