(2010)
Kayleen et Doug se rencontrent pour la première fois à l’âge de huit ans, à l’infirmerie de leur école primaire alors que Kayleen souffre d’un terrible mal d’estomac et que Doug s’est ouvert la figure en descendant le toit de l’école en bicyclette. À treize ans, lors d’une danse à leur école secondaire, Doug s’étire la cheville en dansant le limbo tandis que Kayleen a des nausées. Doug convainc Kayleen de s’embrasser, dans le but de se pratiquer pour leur vrai premier baiser, puis Kayleen vomit, Doug se fait vomir, et ils contemplent le mélange de leurs vomissures dans la poubelle. Ils passent ensuite la nuit entière à discuter dans la cour de récréation.
Depuis, leurs rencontres adviennent lorsque l’un ou l’autre se blesse, et ce, jusqu’à ce qu’ils aient trente-huit ans (les scènes se succédent en avançant de 10 ans puis en reculant de 5 ans). Doug, imprudent et téméraire, excelle à s’empêtrer dans des situations qui ne le laisseront pas indemne : faire exploser des feux d’artifice pour en recevoir un dans l’oeil; monter sur le toit pendant un orage électrique pour être frappé par la foudre; etc. Il s’agit toutefois d’un cercle vicieux. Pour attirer l’attention de Kayleen et la voir, Doug provoque des accidents de plus en plus graves. Lorsque Kayleen vient le visiter, il insiste pour qu’elle touche ses plaies, affirmant qu’elle possède un pouvoir de guérison. Kayleen, à trente-trois ans, utilisera le truc de Doug pour s’ouvrir le ventre.
L’amour que Kayleen et Doug ressentent l’un pour l’autre s’exprime d’une manière déficiente et dysfonctionelle, mais c’est le seul moyen qu’ils connaissent pour le partager. Graduellement, ils s’épuisent; is ne veulent plus guérir, ne veulent plus se blesser. À trente-huit ans, alors que Doug est en chaise roulante, ils regardent ensemble une patinoire en se souvenant d’une nuit passée à se balancer lorsqu’ils avaient treize ans… là où tout a commencé.
Chacune des scènes, associée avec l’âge et la blessure, s’insère dans une structure où les scènes effectuent des bonds dans le temps de manière à ce qu’elles ne soient pas placées dans un ordre chronologique. La pièce se déconstruit en un casse-tête en apparence simple, mais véritablement laborieux et dont l’auteur a manié tous les éléments avec adresse. Gruesome Playground Injuries fait écho aux dynamiques relationnelles contemporaines qui se complexifient.